Pour répondre à cette question il faut d'abord définir le sens de cette expression qui peut renvoyer aussi bien à une pratique régulière qu'occasionnelle d'une langue peu ou fortement singularisée.
Le gallo est utilisé par les personnes âgées et ignoré de la masse des plus jeunes dont certains suivent une initiation dans les établissement scolaires primaires ou secondaires.
Les générations intermédiaires l'ignorent très souvent ou l'utilisent peu ou prou en fonctions des situations : communication entre parents, voisins, soirée contes.
L'opposition entre “parler monsieur , noble” c'est-à-dire français et “ parler pachu, paysan” traduit la conscience d'une hiérachie sociale qui défavorise “les petits mondes”. Cependant ceux qui d'origine gallèse parlent français dans un milieu gallésant peuvent se voir reprocher de “jouer les petits monsieurs de ville, de chinoter”.
Les campagnards qui , dans leur spontanéïté,“ caosent dreit conme ça lou chait ” prennent alors leur revanche sur les “villotins” qui “s'espliquent”, “ se caosent” . L'opposition entre le réfléchi et le réciproque est très nette en gallo : “se caoser” c'est se parler à soi-même, s'écouter parler. L'échange est marqué par “i s'entecaùsent”.
Il reste que la représentation dominante est encore négative. Faut-il parler de diglossie? Selon Martinet,1966 page 149 celle-ci est définie par “ une situation dans laquelle une communauté utilise en fonction des circonstances un idiome plus familier, de moindre prestige ou un autre plus savant et plus recherché.” Il ajoute :“ Toutefois , il y a tant de possibilités diverses de symbiose entre les deux idiomes qu'on peut préférer conserver un terme comme “bilinguisme” qui les couvre toutes.”
Plus récemment la question a été envisagée par Christian Leray 1995 p 123 sous l'angle de la commutation des codes en raison de l'importance du“ vécu social de l'individu ( passé et présent). Il en fournit l'exemple suivant tiré de l'histoire de vie d'Ernestine. “Ainsi est-ce parce que la narratrice a vécu socialement les “bueys” ou “grandes lessives” qu'elle exprime ce vécu en gallo , alors qu'au début elle commençait à décrire la lessive en français :”
Ainsi les termes se trouvent inversés et le gallo malgré son moindre prestige devient un moyen d'identification positive , un signe de reconnaissance, une marque de connivence.